LA PROFONDE INCONNUE
Si vous saviez, passants, attirés
Par d'autres regards charmants
Que le mien, que de feu j'ai brûlé
Que de vie j'ai vécu pour rien,
Que d'ardeur, que de fougue donnée
Pour une ombre soudaine ou un bruit...
Et mon coeur, vraiment enflammé,
Dépeuplé, retombant en cendres.
Ô, les trains s'envolant dans la nuit
Qui emportent nos rêves de gare...
Sauriez-vous tout cela, même alors,
Je le sais, vous ne pourriez savoir
Pourquoi ma parole est si brusque
Dans l'éternelle fumée de cigarette
Et combien de tristesse noire
Gronde sous mes cheveux clairs.
Marina Tsvétaïéva
Traduction de Pierre Léon et dÊve Malleret